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Les paradis sur terre d'Okada

Vous souvenez-vous de Mokiti Okada? Pour un petit rappel, n'hésitez pas à relire notre article sur l'agriculture naturelle de Mokiti Okada pratiquée au Brésil! Cette fois, nous ne sommes plus au Brésil mais au Japon, soit sa terre d'origine! De plus, nous n'explorons plus le versant de l'agriculture mais bien celui de l'art et de la beauté. Pour ce faire, nous avons visité deux des trois "terres sacrées" conçues par Mokiti Okada comme étant des sortes de paradis sur terre! Concrètement, il s'agit de jardins japonais très travaillés, de maisons de thé, de musées d'art, le tout sur un espace limité et empli de symbolisme. Nous avons ainsi été très chaleureusement accueillis à Heiankyo à Kyoto et à Zuiunkyo à Atami. Les responsables sur place se sont pliés en quatre pour nous faire visiter les moindres détails de ces terres sacrées et nous donner toutes les explications nécessaires, et ce en anglais! D'ores et déjà un tout grand merci à eux!

Lors de notre visite à Atami, avec Shintaro Yamamoto, Janet Kozawa et Shutaku Shirai


Une conception de la beauté de la nature toute japonaise


Pour Mokiti Okada, la beauté va nourrir notre esprit et nous élever spirituellement. C'est pourquoi il y accorde une grande importance. Mais de quelle beauté s'agit-il? D'une beauté de la nature ou d'une beauté créée par l'homme (l'art, typiquement)? En bon Japonais, Okada répondrait: un peu des deux! Pour lui, la beauté de la nature est complétée par la main de l'homme. Cela se remarque emblématiquement dans les jardins japonais créés spécialement pour les terres sacrées. Ainsi, l'herbe qui s'infiltrerait entre les graviers sur le chemin est consciencieusement arrachée manuellement par une équipe de bénévoles. Ainsi, le jardin est conçu pour s'intégrer parfaitement au paysage environnant existant et pour profiter des meilleures vues possibles : les arbres seront taillés de sorte à reproduire la forme des bosses des collines derrière eux, le niveau du sol sera relevé pour profiter du meilleur point de vue, des cerisiers et des érables seront placés juste en-dessous de collines où de mêmes espèces se retrouvent, etc. Nous avons été fort impressionnés par le niveau de réflexion et de précision qui ont été mis à l'oeuvre pour créer ses jardins.

Le jardin d'Heiankyo, intégré au paysage environnant. Malheureusement, les cerisiers n'étaient pas encore en fleurs au moment où nous sommes venus...


En particulier, la notion de paysage à contempler est très importante dans ces jardins. Ainsi, outre ce qui a déjà été dit, à la période de floraison des cerisiers personne ne peut s'approcher de ceux-ci, afin de pouvoir toujours profiter de la meilleure vue! De plus, à Atami, un bâtiment a été construit uniquement pour pouvoir profiter depuis celui-ci d'une belle vue sur le paysage environnant, à savoir l'océan et la ville! Notre guide était très ému en nous racontant comment il venait y contempler le lever et le coucher du soleil... Des concerts sont également organisés dans cet espace si particulier.

Un espace en arc de cercle conçu spécialement pour admirer le paysage, qui devient comme une oeuvre d'art grâce aux poteaux verticaux!


De plus, avant d'arriver à ce bâtiment situé en hauteur, le marcheur passera par plusieurs points de vue différents, mais desquels il ne verra pas encore la ville, étant donné qu'elle est cachée par une rangée d'arbres judicieusement placés par Okada. Le but serait de créer un effet de surprise plus grand lorsque le marcheur arrive dans cette pièce, découvrant d'un coup l'ensemble du paysage qui lui était jusqu'alors caché en partie. Notre guide se plaisait à imaginer Mokiti Okada savourer la réaction de ses visiteurs, caché derrière un pilier ;-)


Une particularité des jardins conçus par Okada (je dis "conçus" car certains n'ont pas été terminés de son vivant, mais il a laissé des plans pour ses "fidèles"), est de représenter symboliquement des œuvres d'art qu'il appréciait particulièrement. Ainsi, une allée de pruniers à Heiankyo est faite pour ressembler le plus possible à une peinture de Korin.

Ogata Korin - Red and White Plum trees - Trésor national

L'allée de pruniers conçue pour ressembler au tableau!


À Atami, la forme de la colline et du bâtiment construit au-dessus est censée représenter la forme d'un trésor national du Japon d'ailleurs présenté dans le musée à côté, une jarre à thé.

Nonomura Ninsei- Jarre pour feuilles de thé ornée de wisteria - Trésor national du Japon

La forme de la colline avec le bâtiment au-dessus est censée rappeler la forme de la jarre! La colline est couverte de fleurs au printemps.


Bien entendu, comme partout ailleurs au Japon, les saisons sont particulièrement appréciées et mises en valeur dans les jardins avec des érables pour l'automne, et des pruniers et cerisiers pour le printemps.

Camélia à Atami

Notre guide à Atami nous a dit très chanceux de pouvoir admirer cette fleur possédant à la fois la couleur blanche et la couleur rose!


Vous l'aurez compris: comme pour les jardins japonais en général, il s'agit là d'une conception d'une beauté très arrangée, travaillée, raffinée, et nullement d'une beauté de la nature "sauvage". D'ailleurs, la nature sauvage vient parfois perturber ce projet de paradis sur terre, comme lorsque les sangliers descendent des collines pour chercher des vers dans la mousse, détruisant ainsi les parterres, ou lorsque les cerfs viennent manger l'écorce des arbres. Des dispositifs (branchages, bambous, etc.) viennent alors les en empêcher. Ainsi également, si les pesticides et insecticides sont naturellement proscrits selon les vouloirs d'Okada, il arrive toutefois qu'ils en fassent usage, si les vers se mettent à attaquer trop assidûment les cerisiers! Cependant, une importance est accordée à la préservation de l'écosystème local. Ainsi, dans la petite rivière qui traverse le jardin à Kyoto, l'eau est pure et attire des coquillages, qui eux-mêmes attirent les lucioles qui s'en nourrissent.


Une nature divine


Mokiti Okada croit en un Dieu unique et créateur. Cependant, il intègre volontiers un élément shinto en disant que Dieu "se manifeste" dans la nature au travers des kamis. Chaque plante et chaque animal possède ainsi un esprit. Selon lui, Dieu a créé la nature pour l'homme. Chaque chose, chaque élément naturel serait ainsi à sa juste place. Étonnamment, cela l'amène donc à prôner le "local": ainsi, les Japonais devraient se nourrir de riz et de poisson, car la nourriture locale convient le mieux à l'homme, et utiliser le bambou dans la construction. D'ailleurs, le bambou ayant tendance à être invasif, il sera utilisé de la tête au pieds pour de multiples usages: barrières, poteaux, balais, etc. De plus, notre guide nous a joliment expliqué que si les fleurs de cerisier penchent la tête vers le bas, c'est que Dieu a voulu que l'homme puisse les contempler!

Bambouseraie d'Arashimaya. Mais attention, au Japon, on retrouve des bambous partout, pas seulement dans ce lieu fort touristique!


L'art


Les terres sacrées ne sont pas seulement constituées de jardins, mais également de musées d'art. En effet, l'art était pour Okada une pratique noble par excellence, à côté de l'agriculture et de la médecine. Lui-même a réalisé quelques peintures et calligraphies, vénérées par ses fidèles.

Calligraphie de Mokiti Okada, signifiant "Lumière du printemps"


Okada a ainsi acquis de son vivant de nombreuses œuvres d'art japonaises, dans le but qu'elles ne partent pas à l'étranger et qu'elles puissent profiter au plus grand nombre. Ainsi, le MOA à Atami est très connu et son architecture est très moderne. On peut y admirer trois trésors nationaux, des calligraphies, des peintures, des parchemins de récits, etc.

Kaléidoscopes projetés sur le plafond

Des parchemins longs de centaines de mètres racontent des histoires célèbres

Un détail du parchemin

Une peinture de Takeuchi Seino que Mokiti Okada appréciait particulièrement (et nous aussi!)

Le musée d'art MOA d'Atami vu de l'extérieur


Interview


Nous avons pu interviewer Hiroki Sakane, directeur adjoint de Heiankyo à Kyoto, sur l'importance de la beauté chez Mokiti Okada. Il a insisté sur le fait qu'il n'existe pas encore de position officielle de l'Église à ce sujet, mais seulement des interprétations personnelles des textes d'Okada.

Hiroki Sakane


Un tout grand merci à Shintaro Yamamoto, Janet Kozawa, Mr Kobawashi, Mr Shimpo, Hiroki Sakone et Shutaku Shirai de nous avoir introduits avec tant de gentillesse et d'attention aux terres sacrées de Mokiti Okada!



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