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Le Fitz Roy ou la promesse de beauté

Nous avions décidé de venir séjourner dans la région du Fitz Roy, l’une des « personnalités » naturelles du parc national des glaciers de la Patagonie. Toutefois, nous ignorions tout de cette montagne, ce qui a rendu sa découverte plus émotionnelle que jamais.


Tout a commencé dans le bus en direction de la petite ville d’El Chaltén, le point de départ des randonnées de la région. Le trajet devait durer environ trois heures. À mi-chemin, le bus longe la rive d’un énorme lac. Sur l’autre rive, au loin, apparaît une chaîne de montagnes fabuleuse… « Quel paysage extraordinaire ! Dommage qu’on ne s’y arrête pas… » me dis-je. Un sommet en particulier domine incontestablement les environs, régnant tel un Seigneur sur ses terres.

Prise par Bao

Pourtant, au fur et à mesure que le bus avançait et changeait sa trajectoire, ce Seigneur semblait s’agrandir. Au bout d’un moment, la vérité nous apparaît : « C’est le Fitz Roy ! C’est là qu’on va ! » Je suis ému comme un enfant, nageant déjà dans les rêves tissés par le Seigneur.


Le bus arrive à El Chaltén et nous nous dirigeons avec nos bagages vers un camping. Je ne peux quitter le sommet des yeux… Une fois posés, nous décidons de faire une randonnée de trois jours au Fitz Roy dès le lendemain. Le sentier fait 10 km avec une dernière portion réputée difficile nous amenant à une lagune quasi au pied du Fitz Roy. Celui-ci est déjà énorme vu depuis la ville, et l’idée de s’en rapprocher encore plus m’étourdit.


Le lendemain, c’est parti ! Nous démarrons vers 12h avec nos gros sacs sur le dos contenant la tente, du matériel photo allégé et des vivres pour trois jours. En marche vers le Seigneur…

Prise par Bao

Le premier quart du sentier vers le Fitz Roy, dont on aperçoit le sommet enfumé...


Le chemin est fatigant et nous marchons lentement à un rythme régulier, en travaillant notre respiration. D’autres randonneurs sont de la partie, tous excités par la même rencontre. Au fil des heures, le sommet grandit lentement mais sûrement. Nos yeux sont rivés sur lui à chaque arrêt.

Prise par Pascale

Le Fitz Roy vu depuis la Laguna Capri, à mi-chemin...


Prise par Bao et Pascale

Même s'il est loin, il est déjà imposant à la vue


Nous arrivons enfin au kilomètre 8 sur 10, au camping le plus proche du Fitz Roy. Il est environ 18h. La montagne est immergée dans un banc de brume qui finira par cacher le soleil du crépuscule et limitera les opportunités photographiques. Nous décidons de reporter au lendemain l’ascension finale et passons la fin d’après-midi à observer le Fitz Roy depuis les alentours du camping.

Prise par Bao
Prise par Pascale

L’eau des rivières est potable et absolument délicieuse. Elle revêt une coloration légèrement turquoise typique d’une eau de glacier. Après un repas de baroudeur, nous nous couchons de bonne heure et mettons l’alarme pour le lendemain à… 3h30. En effet, le soleil se lève vers 6h, mais la cime du Fitz Roy est susceptible d’être illuminée déjà un peu avant. En comptant 1h30 d’ascension ardue, nous devions partir vers 4h. Donc, réveil à 3h30 après une nuit trop courte!


Mais pourquoi diable aller voir le Fitz Roy si tôt ? À cause d’un rêve : celui de le voir reflété dans la lagune à son pied, avec sa cime bénie par la lumière rouge du soleil levant. Un photographe ne peut s’empêcher de croire que quand une belle scène est possible, alors elle est certaine. « Mon rêve peut se produire… et mon cœur me dit qu’il va se produire ! » C’est la promesse de beauté que la Nature nous fait, et nous lui faisons confiance.


Le lendemain, à 4h, nous commençons donc l’ascension. Il fait encore nuit, il vente, il pleut légèrement. Nous devons porter sur le dos tout ce qu’il faut pour résister aux intempéries, et cela nous alourdit. Et, bien sûr, nous avons notre matériel photo en plus. Nous comptons les pas… et imaginons la beauté qui nous attend à la fin, car la pente que nous montons nous empêche de voir le Fitz Roy.


Nous arrivons enfin au bout de la montée… Et ne voyons rien car le Fitz Roy est entièrement caché par la brume. Seule la lagune à son pied est visible.

Prise par Pascale

La Laguna de Los Tres, quasi au pied du Fitz Roy. Ce dernier s'élève juste derrière la brume opaque...


La crainte nous envahit. Serait-il possible que la Nature n’ait pas tenu sa promesse de beauté ? L’extase n’était-elle pas au rendez-vous ? Fitz Roy, où es-tu ? La réalité nous frappe : il n’y a jamais eu de promesse, seulement des espoirs. La Nature ne nous doit rien, après tout, malgré une météo que l’on pensait favorable à une belle expérience.


La pluie et le froid nous envahissent. Un à un, les courageux randonneurs ayant fait l’effort matinal redescendent, la mine déconfite. Nous faisons de même, souffrant de l’unique photo fade que nous avons prise « juste comme souvenir ».


Le reste de la journée, nous passons le temps en nous promenant sur un sentier menant à un glacier proche du Fitz Roy. J’essaie pour ma part de faire le portrait des arbres charismatiques de la région.

Prise par Pascale

Le glacier Piedras Blancas

Prise par Bao

Un arbre figé dans son mouvement... Le Fitz Roy est dans le cadre, complètement caché par les nuages...


Mais la beauté que nous attendions reste absente et nous rampons de désespoir. Vers 18h, c’est-à-dire 4h avant le coucher du soleil à 22h, j’étudie une dernière fois une carte du relief local et décide d’aller explorer, hors des sentiers s’il le faut, un endroit qui, peut-être, donne une vue intéressante sur le Fitz Roy.


La lumière est encore crue à ce moment, mais l’inespéré se produit : le nouvel endroit a un potentiel photographique extraordinaire ! Un timide chemin, indiqué par aucun panneau, y mène en traversant une forêt de magnifiques arbres nains et aboutit à une rivière rocailleuse au pied du Fitz Roy. Je retourne prévenir Pascale : il faut absolument y aller. Il ne reste qu’à espérer que les conditions lumineuses soient généreuses… Ce nouvel espoir, bien sûr, est une nouvelle promesse. Nous voyons que la brume qui masquait le Fitz Roy semble timidement se dissiper, c’est un signe.

Les heures qui suivirent furent un délice intégral. Absolument seuls dans la nature, déambulant librement à travers les arbres, montant sur les rochers, longeant les rives de rivières, nous voyons de la beauté partout. Les arbres en particulier sont tellement fabuleux.

Prise par Pascale

Voyez-vous le cerf ? :-)


Prise par Bao

Et enfin, en guise d’au revoir, le soleil diffuse sa dernière lumière dans un ciel doucement cotonneux.

Prise par Pascale
Prise par Pascale
Prise par Bao

Nous sommes remplis d’euphorie. Que nos photos soient réussies ou pas, notre expérience a été magique. La Nature a finalement tenu sa promesse.


C’est pourquoi nous repartirons avec les mêmes espoirs à la rencontre du mont Torre, l’autre Seigneur de la région. La suite au prochain épisode !


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