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La révolution de la houe Ou Les agriculteurs poètes

Grâce à mon ami belge Raphaël et à sa compagne brésilienne Liza, qui habitent à Curitiba, nous avons finalement pu entrer dans l’univers de l’agroforesterie, que nous souhaitions découvrir avec Ernst Götsch ! Nous avons pu passer deux journées en compagnie de jeunes agriculteurs convertis à cette nouvelle façon de cultiver !


L’agroforesterie


L’agroforesterie à la brésilienne consiste à mélanger intelligemment légumes, légumineuses, arbres, arbres fruitiers et compagnie, sur un même espace. Tout d’abord, l’idée est de tirer parti de la succession écologique : les plantes ont des cycles de durée différente, ce qui permet d’une part de récolter tout au long de l’année. Ainsi, les légumes récoltés après moins de deux mois côtoient le manioc qui prendra pour sa part deux ans avant d’être récolté. Ainsi l’espace, et le temps, sont optimisés. D’autre part, cette durée de cycle différente permet à la succession des plantes de travailler à l’amélioration continue du sol.


Ensuite, comme dans la permaculture, les plantes sont associées de façon à ce qu’elles s’entraident, comme dans un écosystème naturel. La différence est qu’ici, l’élément « arbre » est ajouté à l’écosystème (ce qui convient assez bien à des pays tropicaux comme le Brésil !). En fait, les arbres fournissent un compost naturel qui rend le sol plus fertile. Une fois que l’arbre a atteint une certaine hauteur, les branches supérieures sont coupées et broyées afin d’en retirer une biomasse fine qui enrichira le sol. L’idée est d’imiter un processus naturel en l’accélérant artificiellement.


L’idéal de l’agroforesterie est d’aboutir à un système autonome, qui n’ait pas besoin d’intrant extérieur (comme du fertilisant artificiel ou du fumier par exemple, pour amener des nutriments). Nous nous rapprochons donc ici de l’idéal de Mokiti Okada, qui pour rappel refuse l’utilisation de tout intrant. Cet idéal a encore besoin d’être prouvé par des décennies de pratique, afin d’évaluer si le sol ne s’épuise pas en nutriments, étant donné qu’on retire au système les légumes et les fruits.


Merci à Raphaël, qui est agronome, de nous avoir introduits à ce sujet technique ! :)


Réflexions


Pourquoi nous sommes-nous intéressés à l’agroforesterie dans le cadre de notre projet ?


Tout d’abord, celle-ci réconcilie le souci de préservation des forêts et l’agriculture ! Pour un pays comme le Brésil, qui souffre terriblement de la déforestation au profit d’une agriculture de type monoculture industrielle, c’est une révolution !


Ensuite, elle témoigne d’un rapport à la nature différent de la part des agriculteurs de celui qu’on peut trouver dans l’agriculture conventionnelle : ici, l’agriculteur observe le génie de la nature, et tente de le reproduire. Il y a donc admiration et modestie et non domination.


Enfin, elle remet en question la dépendance de l’agriculture envers l’élevage animal comme producteur de fertilisants. Pour les défenseurs des droits des animaux, c’est une piste !


Interviews

  • Marcos

José Marcos Antillon Hernandez s’est installé depuis peu en agroforesterie et fournit des paniers bio entre autres à Raphaël et Liza dans le cadre d’une AMAP (association pour le maintien de l’agriculture paysanne). Il nous a fait la visite de ses deux « champs », se fondant dans la nature sauvage des alentours, et a répondu à nos questions avec passion. Comme au Brésil tout semble s’arranger de manière « organique » comme dirait notre ami François, c’est en visitant ses champs que nous avons rencontré nos autres intervenants !


  • Gabriel

Gabriel Brandão Ribeiro Souza est partenaire de Marcos dans la gestion des cultures agroforestières. Il a d’ailleurs suivi un cours d’Ernst Götsch. Selon lui, l’agroforesterie transforme les agriculteurs en « poètes et philosophes ». Une formule qui n’a pas manqué de nous marquer !

  • Thales et Karina

Thales Bevilacqua Mendonça et Karina Gonçalves David étaient justement en train de visiter la ferme de Marcos lorsque nous sommes arrivés. Le hasard fait que tous deux ont passé une année scolaire en Belgique, lui en Flandre, elle en Wallonie (elle a d’ailleurs été à l’école où j’ai enseigné la morale l’année dernière !), et se sont rencontrés là-bas ! Anciens citadins, tous deux rêvaient d’un retour à la nature et plus précisément à l’agriculture. L’agroforesterie les a séduits par son potentiel révolutionnaire tant au niveau écologique que socio-économique, permettant une transition vers un monde plus vert et plus juste. Thales parle même de « révolution de la houe » ! Ils nous ont fait visiter leurs champs et fait goûter au traditionnel « maté », sorte de thé vert fumé chaud ou froid que l’on sirote avant de remettre de l’eau et de le passer à son voisin :-)



Ils nous ont ensuite fait rencontrer Louis, Belge flamand venu au Brésil avec l’association « Professeurs sans frontières », et les aidant énormément. Il possède entre autres une banque de semences bio de tomates qu’il cultive lui-même (plus de 1000 variétés !).



Tant de rencontres chaleureuses nous ont réchauffé le cœur ! La révolution est en marche au Brésil, et elle sera poétique !


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